EXPOSITION : Didier GOUPY – Photographie
Dates : 03/09/2024 - 10h00 au 28/09/2024 - 18h00
Lieu : Moulin de Pen Castel - Itinéraire
Tarifs : Gratuit
Organisé par : Arzon Évènements
Renseignements : Du 3 au 14/09 : Ouvert du mardi au samedi 10h-12h / 14h-18h | Du 18 au 28/09 : Ouvert du mercredi au samedi 14h-18h | Samedi 21 et dimanche 22 septembre Journées du Patrimoine : Ouvert 10h-12h / 14h-18h
Naissance de la couleur
Portrait d’une forêt
Sombre, bouchée, hostile, la forêt est impénétrable. Vous pensiez la connaître, mais quelque chose ici inquiète, fascine aussi, la densité des arbres peut-être, le fouillis des ronces, un excès qui pourrait décourager, ou alors cette étrange obscurité, irréelle, angoissante.
Le photographe s’enfonce dans la forêt, la respire, laissant remonter en lui des sensations de l’enfance. Jour après jour il interroge la puissance de ce qui se joue là, rend compte par l’image des vibrations enfouies. Tout a commencé dans la forêt de Retz, du côté de Villers-Cotterêts, s’est poursuivi à Fontainebleau, puis Valence en Espagne. Pourtant Didier Goupy n’a rien à dire sur la forêt, pas plus que sur un visage, une silhouette, un mouvement, pas moins non plus. Son projet n’a jamais été d’en répertorier les différences mais, pour un temps, de faire l’expérience magnifique des variations du vivant, de questionner la réalité, de vérifier sa propre place dans le concert bouleversant du monde. La forêt est devenue un personnage aux visages multiples, changeant. Comme toujours dans son travail, Didier Goupy s’installe dans son sujet, l’habite, l’interroge longuement, pour en saisir l’unité. Sa quête est au-delà de la technique.
Le photographe emprunte aux maîtres orientaux une discipline qui tend à « mettre le mental en contact avec la réalité ultime », recherche « un art sans artifice ». Cette expérience vertigineuse toujours recommencée devient chez lui, au fil des décennies, de plus en plus exigeante, radicale. Plus que jamais le corps tout entier est engagé dans l’acte de photographier. Le souffle régule le déclenchement de la prise de vue, c’est à cette condition d’absolue justesse que le mental se met au diapason de l’inconscient. Les Japonais appellent ce moment le satori, qui veut dire intuition, saisissant à la fois la totalité et l’individualité des choses.
Dans la forêt, Didier Goupy compose avec la graphie des arbres, les ombres colorées de verts profonds et de roses, fait remonter de la terre mouillée des bruns et des ocres, scintiller les reflets pointillistes des feuilles aux reflets d’or. De plus en plus l’image tend vers l’abstraction, gomme la frontière entre photographie et peinture, ouvrant ainsi des champs de liberté à l’interprétation. Une lumière rasante, et les arbres deviennent une armée en marche. Des reflets sur une branche tombée, c’est un animal qui surgit. Réelle ou inventée, la forêt parle à chacun d’entre nous. Tout à la fois refuge contre les dangers et lieu des peurs ancestrales, des sombres terreurs, elle génère des histoires fantastiques.
Au fil des saisons, des verts éclatants dilatent l’espace, des trouées de ciel bleu déclinées s’installent en une infinité de registres colorés. Les tapis d’herbes sèches, les mousses, sont autant de matières inscrites dans nos mémoires. Il faut se promener longuement dans les images de Didier Goupy, s’attarder, y revenir, la question du temps depuis toujours est en jeu dans son travail. Inlassablement il confronte la pensée des philosophes, explore le difficile chemin de l’oubli de soi, « ne pas laisser la pensée s’interposer entre soi et le geste ». Temps suspendu, temps d’éternité, c’est à cette condition que l’œuvre peut advenir.
Marie Françoise Le Saux
Historienne de L’art
Août 2021
Sources : Didier GOUPY - Photographie | Arzon Évènements (arzonevenements.fr)